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Méditation de Mgr Brunin – dimanche 26 avril

mardi 28 avril 2020Diocèse

Méditation pour la 3ème dimanche de Pâques

Les disciples d’Emmaüs (Luc 24, 13-35)

Un récit surprenant ! Jésus rejoint deux de ses disciples qui rebroussent chemin après le désastre du Vendredi Saint. Tous les espoirs qu’avait soulevés en eux l’aventure de la suite de Jésus, se sont évanouis au moment de sa mort sur le Golgotha. Il ne leur reste plus qu’à s’en retourner vers leur village, reprendre leurs activités, faire leur deuil de cette parenthèse enthousiasmante, pour ressasser leur déception et leur amertume.

La question de Jésus ouvre notre prière personnelle

« Et Jésus marchait avec eux ! » Il les rejoint là où ils se sont arrêtés : « Ils l’ont crucifié. Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël ». Jésus les retrouve là même où leur espérance a sombré. « De quoi discutez-vous en marchant ? » Voilà bien la façon de faire habituelle de Jésus avec ces deux disciples… mais aussi avec nous. Il ne s’impose jamais mais s’approche discrètement. Il cale son pas sur notre pas et nous fait parler de notre vie. Il invite à lui exprimer tout ce que nous portons, parfois lourdement (émotions, tristesses, désarroi, angoisse, amertume et regrets…) Mystère de la prière qui est toujours réponse à l’incessante demande de Jésus, présent à nos côtés : qu’est-ce qui te réjouit ? qu’est-ce qui te pèse ? Qu’est-ce qui te fait douter ? Pourquoi revenir sur tes pas ?

Dans l’intimité d’une prière personnelle, engageons notre réponse à Jésus, notre compagnon de route. Ouvrons-lui notre cœur pour lui exprimer ce qui nous fait avancer, mais aussi nos doutes, nos angoisses, nos hésitations…

 

Les Écritures révèlent le sens de ce que nous vivons

Nous aussi, nous sommes souvent dans le doute et dans la désillusion. Et comme les deux disciples,  nous cheminons le visage sombre et fermé. Autour de nous, en ce moment, nous entendons parler de crise, de maladie, de récession, de mort… Nous sentons l’inquiétude monter en nous à l’écoute des prévisions sombres pour l’avenir de notre société. Nous restons perplexes face aux injonctions : il faudra changer nos façons de vivre, de nous rencontrer, de partager ! Ça ne peut plus être comme avant. Il faut inventer l’après. Nous nous sentons petits et fragiles devant de telles injonctions.

Mais, comme hier, sur le chemin d’Emmaüs, Jésus est là, présent à nos côtés. Pas plus qu’aux disciples d’hier, Jésus n’apporte les réponses toutes faites aux nombreuses questions qui nous assaillent. Pas plus qu’hier, Jésus ne vient apporter un monde parfait et harmonieux, clef en main : « Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël ! » Patiemment, Jésus nous invite encore à relire notre histoire à la lumière des Écritures. Pour un croyant, le sens de l’histoire ne se dévoile pas seulement dans une reprise « autoréférencée », à partir de nos propres appréhensions, notre ressenti ou nos repères idéologiques. Notre histoire prend sens lorsque nous la mettons en perspective avec la Parole de Dieu. Car c’est bien elle qui nous éclaire, nous aide à comprendre ce qu’il nous arrive et nous ouvre un chemin vers l’avenir. Alors, notre cœur peut devenir aussi « brûlant en nous ».

Laissons monter en notre cœur, un passage de l’Ecriture que l’Esprit Saint nous a inspiré récemment. Relisons-le et laissons-le éclairer ce que nous vivons aujourd’hui. Permettons à l’Esprit de prier en nous afin que ce passage de l’Ecriture que nous avons accueilli, devienne Parole de Dieu pour nous, présence de Jésus sur notre chemin.                 

 

Dépasser la nostalgie pour découvrir une présence et une mission

Tout aurait pu s’arrêter là pour les deux disciples. Ils auraient abandonné ce compagnon de route, à la croisée des chemins. La conversation avec lui se serait limitée à raviver de bons souvenirs, à évoquer un passé heureux mais irrémédiablement perdu, à nourrir une nostalgie qui assombrirait pour longtemps leur quotidien. Mais le récit évangélique ouvre sur un troisième temps : les disciples retiennent l’inconnu et l’invitent à rester avec eux. Sans le savoir, ils brisent ainsi le cercle de la mémoire pour vivre une rencontre mystérieuse qui a le goût du présent et ouvre un avenir : « Alors leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent ».  

Notre foi au Christ n’est pas seulement un culte de la mémoire, mais une rencontre actuelle qui nous renvoie au service de la mission que Jésus a initiée sur les chemins de Palestine et qu’il poursuit aujourd’hui, présentement, en nous y associant. « A l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem ». Ayant reconnu leur Maître dans le partage du pain rompu, ils cessent de ressasser un passé révolu, ils deviennent disciples missionnaires du Christ.

Pour vivre pleinement l’Eucharistie en ce temps de confinement

En ce temps de confinement, nous souffrons de ne pouvoir recevoir en partage le Corps du Christ. Nous suivons en nous y associant, les célébrations eucharistiques retransmises depuis Rome par KTO ou le dimanche matin avec le Jour du Seigneur. Suivons ces célébrations à la manière des disciples d’Emmaüs. La Parole de Dieu peut rendre notre cœur tout brûlant. Et quand arrive le moment de la communion, dépassons le seul sentiment de manque. Redisons avec foi la prière que le pape François nous suggère pour vivre une authentique communion spirituelle, dans l’attente de pouvoir bientôt recevoir Celui qui, comme à la table d’Emmaüs, nous partage son Corps :

« À tes pieds, Jésus, je me prosterne et je t’offre le repentir de mon cœur contrit qui s’abîme dans son néant en ta sainte présence. Je t’adore dans le sacrement de ton amour, l’Eucharistie.

      Je désire te recevoir dans la pauvre demeure que t’offre mon cœur ; dans l’attente du bonheur de la communion sacramentelle, je veux te posséder en esprit.

    Viens à moi, Jésus, pour que je vienne à toi. Puisse ton amour enflammer tout mon être pour la vie et pour la mort. Je crois en toi, j’espère en toi, je t’aime. Amen.» 

     (Prière pour la « communion spirituelle » des baptisés qui ne peuvent actuellement communier de façon sacramentelle)

+ Mgr Jean-Luc Brunin