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Méditation de Mgr Brunin – dimanche 3 mai

jeudi 30 avril 2020Diocèse, Expression de l'évêque

Méditation pour le 4ème dimanche de Pâques – Journée de prière pour les vocations

Même s’il n’est plus très courant, chez nous, de voir un berger guider son troupeau de brebis, il ne nous est pas difficile de comprendre le message que véhicule le recours à cette image présente dès le Premier Testament, et reprise ici par Jésus dans l’Évangile. Elle révèle l’attention prévenante de Dieu à l’égard de son peuple, à l’égard de chacun et chacune de nous. L’Église est la communauté de tous ceux et celles qui ont mis leur foi dans le Christ, qui ont entendu sa voix et qui veulent le suivre. Le Pasteur de l’Église, c’est Lui, Jésus, toujours vivant au milieu de nous lorsque nous sommes réunis en son nom. C’est sa Parole que nous écoutons, c’est lui que nous suivons. 

En ce temps de confinement, dans l’impossibilité de nous réunir en communauté de croyants, comment vivons-nous, malgré tout, la dimension ecclésiale de notre foi ?

 

Me connaître comme je suis connu

Le Bon Pasteur, nous dit l’évangile, connaît chacune de ses brebis par son nom. Pour lui chacune est unique et irremplaçable. Elle possède une telle valeur à ses yeux que le berger est prêt à donner sa vie pour elle. Le « troupeau » est pourtant bien diversifié : il y a la chétive, l’audacieuse, la timide, la gourmande bien en chair, la dominante, la farouche… Et pourtant, toutes forment l’unique troupeau, guidé par l’unique Pasteur. Chacune d’elles est appelée de façon particulière.

Un rassemblement de la Pastorale des jeunes, voici deux ans, avait pour thème : « Toute vie est vocation… Ta vie est vocation ». Nous reprenions ainsi conscience que chaque disciple est appelé à rester ouvert aux appels du Christ. Devenir chrétien n’est jamais la correspondance à une image idéalisée de soi-même, ni la mise en œuvre d’une feuille de route toute écrite. La dimension vocationnelle de la vie chrétienne réside dans la ferme détermination à nous ouvrir aux appels de l’Esprit de Jésus qui nous accompagne au long du chemin, qui oriente notre parcours de vie et éclaire nos choix.

Le Bon Pasteur nous connaît et écouter sa voix, c’est nous connaître ! Un disciple de Jésus construit sa vie, non pas de façon « autoréférencée », comme le dit souvent le pape François, mais à partir de l’écoute attentive de la Parole que le Seigneur nous adresse et qui est toujours un appel personnel à avancer et grandir dans la fidélité. C’est bien sur ce chemin que nous avons été placés depuis notre baptême. « La première vocation et la plus importante, est la vocation baptismale » (Christus vivit, 267).

Les paroles de la vocation

Comme chaque année, le pape François adresse un message pour cette 57ème Journée mondiale de prière pour les vocations. Il choisit, cette année, de reprendre, pour l’ensemble du Peuple de Dieu, les quatre mots-clés qu’il avait commentés récemment dans sa lettre aux prêtres. Les quatre mots forment le thème de cette année : souffrance, gratitude, courage et louange. Quatre attitudes qui nous permettent de faire de notre parcours de vie, un chemin vocationnel à l’écoute du Bon Pasteur.

Dans notre vie, « rien n’est le fruit d’un chaos privé de sens … tout peut être intégré sur un chemin de réponse au Seigneur qui a un plan magnifique pour nous » (pape François, Christus vivit 248).

Comment puis-je dire que tout, dans ma vie, participe à la réponse que je donne à Jésus qui m’appelle ?

  • Souffrance

Les difficultés et les obstacles sont rarement absents de notre parcours de vie. Parfois, nous nous interrogeons sur le sens de ce qu’il nous est donné de vivre. Nous nous demandons si nous allons dans la bonne direction, si nous ne nous engageons pas dans des impasses, si nos choix ne reposent pas sur des illusions ou des rêves. Nous interroger sur le sens de notre existence ne laisse pas en repos. Il y a toujours un prix à payer pour vivre en fidélité à l’appel du Seigneur. Nous lui faisons confiance, car le Bon Pasteur nous conduit vers la vie. Mais comme lui, ce chemin passe toujours par la croix. Nous devons mourir à notre suffisance, à nos rêves de puissance, à nos illusions sur nous-mêmes.

Quel est le prix de ma fidélité à l’appel que le Seigneur m’adresse ? A quoi dois-je mourir pour vivre cette fidélité et découvrir la beauté du chemin sur lequel Jésus me conduit ?

 

  • Gratitude

La fidélité à l’appel du Christ est un chemin sûr qui éveille en nos cœurs un sentiment de profonde  gratitude. « La réalisation de nos projets de vie n’est pas le résultat mathématique de ce que nous décidons dans un moi isolé » écrit le pape François dans le message qu’il nous adresse en ce jour. Faire l’expérience d’avancer dans la vie sous le regard aimant du Seigneur qui m’accompagne, m’indique la direction, me signale les écueils possibles, c’est faire l’expérience quotidienne de Sa Miséricorde. La joie de l’Évangile naît d’une telle expérience qui nous fait avancer dans la confiance. Ce que Jésus sollicite, c’est avant tout notre amitié. « Me veux-tu comme ami ? » (Christus vivit 250)

Je prie le psaume 22 : « Le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien … Grâce et bonheur m’accompagnent tous les jours de ma vie ». En faisant mienne la prière du psalmiste, je laisse mon cœur s’emplir de gratitude pour Jésus, l’ami que le Père m’envoie et qui ne cesse de m’accompagner par Son Esprit.

 

  • Courage

Nous mettre en chemin à l’appel du Bon Pasteur, c’est toujours consentir à laisser nos horizons familiers, à quitter nos habitudes et nos routines pour entrer dans une itinérance avec Jésus. Ce fut déjà l’expérience d’Abraham : « Quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père, et va vers le pays que je te montrerai » (Genèse 12, 1). Oui, il faut du courage pour nous décider et nous mettre en route.

La vocation est toujours un choix de vie éclairé dans l’écoute du Seigneur. Qu’il s’agisse du mariage, du célibat consenti, de la vie consacrée, du ministère de diacre ou de prêtre, nous devons nous risquer. Notre liberté est à ce prix ! Oser choisir, oser s’engager. Quand nous suspendons notre choix, quand nous retardons notre décision sous prétexte de rester libres, nous sommes confinés dans une liberté formelle, idéelle et non  authentique. Nous  décider à répondre à l’appel du Seigneur, c’est advenir à une authentique liberté évangélique. Assumer notre vocation, engager notre vie sur le chemin que l’appel du Christ nous ouvre, c’est nous arracher à l’incrédulité paralysante, au doute, à nos peurs,  pour advenir pleinement à notre humanité nouvelle reçue au baptême.

Je m’interroge devant le Seigneur : reconnaître pour quoi je suis fait, le pourquoi d’un passage sur cette terre… quel est le projet du Seigneur pour ma vie… A quelle(s) décision(s) suis-je invité ?

 

  • Louange

Sur le chemin de notre vocation, notre vie s’ouvre à la louange. Contemplons la Vierge Marie. Parce qu’elle a entendu et s’est rendue disponible à l’appel du Seigneur, elle a pu s’investir pleinement dans sa vocation de Mère du Sauveur et Mère de l’Église. Demandons-lui de trouver le courage de prononcer notre propre « fiat » afin que notre vie entière devienne louange pour le Seigneur. Dans le consentement à devenir ce que Jésus nous appelle à être dans la réalisation de sa mission, en disciples-missionnaires, nous pouvons reprendre et faire nôtre la prière du Magnificat.

J’accueille pour moi-même, le souhait que le pape François exprime aux jeunes : « Courez, attirés par ce Visage tant aimé que nous adorons dans la sainte Eucharistie et que nous reconnaissons dans la chair de notre frère qui souffre. Que l’Esprit Saint vous pousse dans cette course en avant. L’Église a besoin de votre élan, de vos intuitions, de votre foi. Nous en avons besoin. » (Christus vivit, 299)

Notre vie conduite comme réponse à l’appel du Bon Pasteur, devient louange à la Gloire de Dieu, signe d’Évangile et service de nos frères et sœurs en humanité.

+ Jean-Luc BRUNIN, Évêque du Havre