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Chemins de Carême – Message de Mgr Brunin

Message de Carême 2021

Frères et sœurs,

Le Carême de 2021 se vivra à peu près sous les mêmes conditions que le Carême de l’an dernier. Dans un confinement dont les formes imposées nous tiennent à distance les uns des autres, la tentation serait de diluer ce temps fort de notre vie chrétienne dans la grisaille d’un quotidien plein de frustrations et sans relief particulier. Or, le Carême est invitation à instaurer une rupture dans la trame de notre quotidien. C’est un temps offert pour réévaluer et réajuster nos relations aux autres, à Dieu et aussi à nous-mêmes. Nous pouvons faire des quarante jours qui s’ouvrent devant nous, un temps de joie par l’expérience d’une présence renouvelée et plus attentive aux autres, au monde et au Seigneur.

Nous laisser reprendre au cœur de notre histoire

Le Carême est le temps où nous laissons le Seigneur reprendre à l’intérieur de notre histoire, les diverses ruptures provoquées par le péché qui marque inévitablement nos vies. C’est le temps pour la conversion.

Une pédagogie de filiation

Si nous lui offrons de notre temps, l’Esprit du Christ peut affermir notre relation avec Lui et rattraper notre filiation avec le Père. Pour cela, il nous faut consentir à inscrire dans le fil de nos journées, des moments de silence et de prière personnelle. L’Esprit viendra prier en nous.

« L’Esprit Saint vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut » (Romains 8, 26)

« Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs, et cet Esprit crie « Abba ! », c’est-à-dire : Père ! » (Galates 4, 6)

La prière est nécessaire pour vivre en enfants de Dieu. Nous acceptons de déchirer la trame du quotidien de nos activités, de nos routines, de nos habitudes ou de nos lassitudes, pour relire notre vie sous le regard du Seigneur et nous laisser faire par Lui. Eclairés par l’écoute de la Parole et inspirés par l’Esprit qui nous dévoile les desseins du Père, nous ouvrons notre existence au désir de Dieu sur nous-mêmes. Etre disciples, c’est vivre avec Jésus pour devenir comme lui et avec lui, obéissants à ce que le Père attend de nous. Cette obéissance au Père, dans le Fils, est le premier ressort de notre vie de baptisés.

Une pédagogie de fraternité

Le Carême est aussi le temps où le Seigneur veut disposer nos cœurs pour rattraper nos relations distendues ou rompues avec ceux et celles qui nous entourent, en famille, dans notre vie professionnelle ou dans notre environnement proche. Laissons l’Esprit du Christ réajuster nos relations pour les insérer dans une fraternité plus authentique. Il saura nous inspirer les mots, les gestes et les démarches qui feront de nos vies un vrai service de nos frères.

« Servir, c’est en grande partie, prendre soin de la fragilité. Servir signifie prendre soin des membres fragiles de nos familles, de notre société, de notre peuple. Dans cette tâche, chacun est capable de laisser de côté ses aspirations, ses envies, ses désirs de toute puissance, en voyant concrètement les plus fragiles. […] Le service vise toujours le visage du frère … et cherche la promotion du frère » (Fratelli tutti, 115)

Le Carême est le temps offert pour progresser dans le service des autres, particulièrement de ceux qui nécessitent que l’on prenne soin d’eux. Ils sont près de nous, à notre porte ou dans nos rues : étudiants isolés, personnes malades ou marquées par un handicap, salariés privés d’emploi, familles dans la précarité, réfugiés, personnes sans domicile fixe … Le temps du Carême est une invitation à leur prêter une attention plus forte pour découvrir comment leur manifester une attitude de solidarité et de partage.

Nous ne pouvons pas nous limiter à une simple démarche individuelle. Des mouvements et des associations existent, heureusement !, pour rejoindre toutes ces misères que la crise sanitaire et les difficultés économiques  aggravent. Le service des autres passe par l’inscription dans des démarches collectives.

Pour réfléchir

Comment nous informons-nous pour rejoindre ceux et celles qui sont déjà actifs en paroisse, dans les mouvements de solidarité (équipes St Vincent de Paul, Secours Catholique, Restos du cœur, Banque alimentaire des étudiants, Welcome…), sans oublier l’ouverture à la solidarité internationale avec le CCFD (Comité Catholique contre la faim et pour le Développement) dans sa campagne de Carême ?

Réévaluer notre vie en Eglise

Le Carême est aussi un moment propice où nous réévaluons notre vie en Eglise. Disciples du Christ, ne sommes-nous pas trop passifs au sein des groupes chrétiens auxquels nous appartenons ? Est-ce que nous portons le souci de rendre nos communautés,  en paroisse, en mouvement ou au sein des services pastoraux, davantage ouvertes aux situations qui marquent nos contemporains, aux questions qui les travaillent et qui engagent l’avenir de notre société et de notre humanité. L’Eglise ne cesse de nous tenir en éveil au nom du compagnonnage d’humanité qu’elle a entrepris depuis ses origines.

« Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur » (Concile Vatican II, Gaudium et spes, 1)

L’enseignement magistériel du pape François, dans la lignée de ses prédécesseurs, est porteur d’une belle ouverture sur les questions représentant des défis majeurs pour l’avenir de l’humanité et de nos sociétés (l’écologie intégrale qui unit respect de l’environnement et solidarité avec les pauvres, la paix et la justice entre les peuples, la vie et la vocation des familles, la fraternité universelle et l’amitié sociale…)

Pour réfléchir

Comment cherchons-nous à nous informer ? Comment sommes-nous attentifs aux appels de l’Église pour chercher les moyens d’agir ensemble, là où nous sommes ? 

Comment cherchons-nous à répercuter les interpellations du Saint-Père autour de nous pour conscientiser les personnes et les inviter à changer leurs façons de vivre ? à devenir acteurs pour avancer vers une société plus solidaire et plus fraternelle ?

Notre foi à formuler pour l’annonce de l’Evangile 

Durant le temps du Carême, chaque paroisse, aumônerie ou mouvement propose des moments forts de partage, de prière, de célébration sacramentelle, de formation et d’approfondissement de notre foi. Malgré les limites imposées par la situation sanitaire, en beaucoup d’endroits, des propositions se sont élaborées. Je vous encourage à rejoindre celles d’entre elles qui vous sont accessibles et que vous jugerez nécessaires pour progresser dans votre vie de disciple de Jésus.

Je voudrais attirer votre attention sur l’importance, en ces temps difficiles, de vous rendre attentifs à ce que le Seigneur veut nous dire et faire effort pour expliciter ce que nous accueillons de Sa Parole. Notre foi ne prend corps que si elle est formulée en fidélité à ce que nous vivons. Le Christ continue de nous rejoindre en ces temps de crise sanitaire qui perturbe notre vie. Il manifeste fidèlement Sa présence à nos côtés et nous éveille sans cesse à la nouveauté de l’Amour du Père. Il nous ouvre ainsi des chemins de fidélité à notre vocation de baptisés. L’Eglise a besoin des fidèles qui s’efforcent d’exprimer la foi de façon personnelle, dans le concret de ce qu’ils vivent, notamment en cette période troublée et bouleversante que nous traversons.

Pour réfléchir

Qu’est-ce que Dieu veut nous dire ? … et dire aux hommes et aux femmes de notre temps ? A quoi nous appelle-t-il ?

Dans l’écoute de Sa Parole, les yeux fixés sur le Christ que nous nous efforçons de suivre, le Père engage conversation avec nous et attend que nous lui répondions. Nous pouvons le faire, chacun de notre côté. Mais l’Eglise est aussi un espace où il doit être possible de partager fraternellement ce que nous découvrons de l’actualité de la présence et des appels de Dieu. Confesser notre foi est une nécessité pour qu’elle prenne corps dans notre existence et façonne notre être chrétien. Confesser la foi n’est pas seulement répéter des formules que nous avons reçues, mais c’est aussi nous risquer à partager avec d’autres ce que nous discernons de la présence et de l’action de Dieu dans nos vies et dans la vie du monde. Si nous ne nous entraînons pas à exprimer notre foi entre disciples du Christ, nous ne pourrons pas vraiment l’annoncer au monde comme Bonne Nouvelle.

Pour réfléchir

Parmi les propositions qui nous sont faites au temps du Carême, privilégions celles qui nous permettront de chercher avec d’autres ce que le Seigneur veut nous dire et à quoi il nous appelle dans les différents domaines de notre vie chrétienne.

Par nos échanges et nos partages, nous nous laisserons devenir un Peuple chargé d’annoncer à notre humanité en désarroi, l’Evangile de la joie et de l’espérance. Nous permettrons ainsi au Ressuscité de faire retentir dans le monde, la parole qui annonce le Salut qu’il nous a acquis  par sa Mort et sa Résurrection.

Frères et sœurs, je vous souhaite une bonne route vers Pâques. Restons fraternellement unis autant que la situation sanitaire nous le permette. Avançons ensemble dans la prière, la fidélité au Christ et la confiance en l’avenir. Soyons ensemble une Eglise animée du désir de partager avec tous, l’Espérance du Ressuscité.

Votre évêque,

Mgr Jean-Luc Brunin