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Comme un chemin à contre-courant… Homélie du mardi à Lourdes

mardi 22 août 2023Non classé

Comme un chemin à contre-courant, . . .

Reine des anges, Reine des patriarches, Reine des prophètes, Reine des apôtres, Reine des martyrs, Reine des confesseurs, Reine des vierges, Reine de tous les saints, Reine conçue sans le péché origine, Reine élevée au Ciel, Reine du très saint rosaire, Reine des familles, Reine de la paix…

Ces litanies de Lorette montrent combien la Vierge Marie est honorée comme Reine dans notre Eglise depuis bien longtemps, Saint Jérôme lui-même affirme qu’en syriaque, Marie signifie Souveraine.

Alors, si le pape Pie XII institue en 1954 la fête liturgique de la Bienheureuse Vierge Marie Reine, c’est pour nous inviter à, écrit-il, « contempler celle qui, assise à côté du roi des siècles, resplendit comme reine et intercède comme mère. »

Reine car Mère du Prince de la Paix, nous le comprenons aisément, celle qui donnera naissance à celui dont Isaïe prophétise que « le pouvoir s’étendra, et la paix sera sans fin pour le trône de David et pour son règne. . . »

Mais la liturgie, dans toute sa finesse inspirée, nous offre ce passage d’Evangile de l’Annonciation, dont la finale, j’oserai dire le point culminant, est l’abaissement total jusqu’à la servitude de celle qui devient à l’instant la mère de Dieu : «Voici la servante du Seigneur. »

Et Pie XII ne s’y trompe pas quand il précise que « Marie est devenue la première de ceux, qui servant le Seigneur, également dans les autres, conduisent leurs frères vers le Roi dont on peut dire que le servir, c’est régner. »

Que ce pèlerinage soit donc l’occasion de nous lancer dans ce chemin à contre-courant des chemins de pouvoir et de puissance, ce chemin de service, à la suite de Marie que nous venons rencontrer en ce lieu si fort.

Comme un chemin à contre-courant, . . .

Le sanctuaire de Lourdes nous invite cette année à méditer sur la parole prononcée par Marie à Bernadette le 2 mars 1958 : « Allez dire aux prêtres que l’on bâtisse ici une chapelle ».

Comment donc ? Ce ne sont pas plutôt les prêtres, nos pasteurs, qui seraient censés nous dire ce que nous devons faire ? La synodalité n’est pas une invention du pape François, puisque Marie elle-même s’appuie sur la petite Bernadette pour qu’elle aille transmettre ce message aux prêtres . . . et cela marche, il suffit d’observer la « chapelle » et les fruits de celle-ci par ces milliers de pèlerins. Rappelons que Jésus lui-même a souvent mis au milieu l’aveugle, l’étranger ou les petits enfants en les prenant comme exemple.

Empruntons donc ce chemin à contre-courant, ce chemin de synodalité qui nous invite à nous mettre d’abord à l’écoute du plus petit, du malade, du mendiant, de l’exclus, de celui qu’on ne voit pas, qu’on n’entend pas pour porter sa parole à nos pasteurs, prêtres et évêque !

Comme un chemin à contre-courant, . . .

Il n’y a pas ici de guide, il n’y a pas ici de sachants, de meilleure voie, nous sommes tous ici pèlerins et chacun va vivre son expérience de pèlerinage. Résident, membre de l’hospitalité ou simple pèlerin, nous sommes tous invités à rencontrer Marie et, par elle, son Fils Jésus, le Sauveur. Et pour ne pas nous tromper de chemin, 5 mots-clefs nous sont proposés, ceux-là même chers au Pape François : Accueillir – Accompagner – Discerner – Entrer – Partager

Nous prendrons le temps de les parcourir, mais aujourd’hui, je ne m’arrête que sur les deux premiers. Accueil et accompagnement sont en effet inséparables.

« Elle me regardait. Elle me souriait. Elle s’inclinait devant moi. Elle me disait : vous. » Telle est la délicatesse de Notre Dame à l’égard de Bernadette.

« Marie est celle qui sait transformer une grotte en maison de Jésus » fait remarquer le Pape François (E.G. n°286). Or, « à tous ceux qui l’ont accueilli, Jésus a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu » (Jn 1,12).

Cet accueil que Marie a réservé à Bernadette, c’est à chacun de nous qu’elle le propose aujourd’hui, accueil dont la seule finalité est la rencontre avec Jésus, le Sauveur.

Mais les prémices de cet accueil ont commencé bien avant ce jour. Songeons un instant à toutes les personnes qui ont été sur notre chemin pour nous permettre d’être présents ici, ceux qui nous ont aidé dans les démarches d’inscription, dans les préparatifs, dans les conduites, . . .

Mais l’accueil des autres n’est pas réservé à certains. A Lourdes, on s’accueille les uns, les autres. La règle de l’accueil vécu par la Vierge Marie avec Bernadette est simple : Préférer l’autre à soi et l’exprimer par le don de soi.

Qui accueille n’hésite pas à accompagner. Qui accompagne commence par accueillir. Mais qui accompagne ne perd jamais de vue son but : il accompagne en vue de la rencontre avec Notre Dame qui, elle, donne le Christ Jésus, le Sauveur.

C’est pourquoi, comme pour l’accueil, dans l’accompagnement, la personne la plus importante, c’est toujours l’autre.

Osons donc suivre ce chemin à l’encontre de l’individualisme et du développement personnel que prône parfois notre société en accueillant et en nous laissant accueillir par notre prochain.

Comme un chemin à contre-courant . . . enfin.

Car le chemin que je vous propose de prendre, plutôt que d’aller vers l’extérieur, est de commencer par aller vers l’intérieur. Pour trouver la Lumière, nous devons descendre à la Grotte, celle qui est en nous. Nous allons tout à l’heure aller à la Grotte et nous allons y aller ensemble, nous accompagnant les uns les autres. Questionnons-nous donc alors pour savoir de quoi est faite ma grotte, les soucis, maladies, troubles qui la composent. Le défi de ce pèlerinage à Lourdes sera de faire de notre grotte intérieure, si inhospitalière, le lieu d’accueil de Jésus lui-même, et dont le signe ici est la source d’eau pure.

Bon chemin à tous . . . à contre-courant.

Jérémie Lesage, diacre permanent